Trouver le temps de penser stratégie, un article de Bernadette Petitpas

Entre la COVID dont les effets n’ont pas fini de se faire sentir, la hausse des taux d’intérêts, la pénurie de main d’œuvre et les chaînes logistiques encore capricieuses, la gestion de ou au sein de votre organisation n’est pas simple. Bien sûr que vous aimeriez disposer de plus de temps, incluant du temps pour réfléchir, pour vous intéresser à tout ce qui est stratégique, mais l’urgent…c’est maintenant.

Voici d’ailleurs quelques statistiques qui attestent de la nécessité pour bien des gens de revoir leur gestion du temps : selon une étude réalisée par Get More Done[1], seuls les trois cinquièmes du temps des gestionnaires contribuent à générer de la valeur, avec 1% du temps consacré à la stratégie et 8% à la planification.

En ce qui a trait à la haute direction, certains[2] sont d’avis qu’en 2023, les Chefs de la direction, en particulier des grandes organisations, devraient consacrer 30% de leur temps à la définition, à la révision ou l’évolution puis au suivi de l’implantation de la stratégie, et c’est sans compter le fait que le focus doit en bonne partie se concentrer sur le futur.

Et si vous pouviez le trouver ce temps de penser stratégie? Seriez-vous disposé à prendre un peu de temps pour disposer de plus de temps?

Un investissement pour un rendement donc, avec des impacts positifs autant sur votre vie professionnelle (et son agenda débordant) que pour les autres aspects de votre vie que vous délaissez parfois, ou peut-être même trop souvent à votre goût?

(Re)penchons-nous sur un outil que vous connaissez probablement : la matrice d’Eisenhower.

Issu du livre Où est mon sentier battu?

Eisenhower[3], Dwight de son prénom et que l’on surnommait Ike, est ce général qui a planifié le débarquement de Normandie de 1944. Il est nommé commandant en chef de l'OTAN en 1950 puis devint plus tard Président des États-Unis en 1953. Il était célèbre pour sa productivité hors du commun, en partie due, j’imagine, à l’outil (matrice) qu’il a créé et qui porte son nom.

C’est Stephen Covey qui l’a popularisée en 1989 grâce à son livre, les 7 habitudes des gens efficaces[4].

L’objectif de la matrice, et ce par quoi elle permet de dégager du temps, est de nous aider à distinguer ce qui est important de ce qui l’est moins, ce qui est urgent de ce qui ne l’est pas, puis de décider ce à quoi l’on consacrera notre temps, notamment celui consacré à la stratégie. Mais au fait…à votre avis quel est le temps que vous consacrez chaque semaine aux questions stratégiques? Et qu’est-ce que cela représente comme pourcentage?

 Voyons un peu cette matrice!

En regardant sa représentation à droite, où situeriez-vous les activités que vous associez à la stratégie?

Nous y reviendrons un peu plus loin. Abordons maintenant les quadrants en commençant par le numéro 4. 

Quadrant 4

Le quadrant 4, c’est celui de ce qui n’est ni urgent ni important. Il s’agit de tâches que nous n’avons pas besoin de réaliser immédiatement, et peut-être même de distractions, comme quand on se perd un peu sur les réseaux sociaux, ou que l’on assiste à des rencontres qui ne présentent pas vraiment d’intérêt pour nous ET dans le cadre desquelles nous n’apportons pas vraiment de valeur non plus. En clair… ce sont des activités dont on pourrait se passer.

Quadrant 3

Le quadrant 3 est celui de ce qui est urgent mais pas vraiment important, en ce sens que ces tâches ou actions ne contribuent pas à l’atteinte de nos objectifs à long terme. Ce sont souvent des choses que nous faisons pour d’autres, comme répondre à un collègue ou à un ami qui vous appelle en urgence. Et puis il y a une bonne quantité d’appels et de courriels. Une grande portion de notre temps est consacrée à ce type d’éléments. Doivent-ils être complétés? Certes, parce qu’ils sont urgents. Mais faut-il vraiment que ce soit par vous? Ne vous est-il pas possible d’en déléguer une (bonne) partie? Car il ne s’agit pas ici de remettre en question leur nécessité, mais de vous interroger sur la valeur ajoutée de votre temps. Et de vous demander si c’en est la meilleure utilisation.

Quadrant 1

Le quadrant 1 est celui de ce qui est à la fois urgent et important. On y retrouve ce que vous devez réaliser vous-même, maintenant, et qui contribue à vos objectifs à long terme. Parmi les exemples, ces dossiers ou rapports que vous devez remettre dans quelques jours, les factures qui doivent être payées dans un délai tout proche, ou, sur un plan plus personnel, cette visite à l’hôpital auprès d’un proche. Il est de ces urgences qui ne se prévoient pas, comme un accident par exemple. Il en est d’autres par contre qui auraient pu ne pas le devenir, comme ce rapport qu’on nous a demandé il y a de cela trois mois. Nous avons donc le pouvoir d’agir sur une partie de ces éléments en choisissant différemment ce à quoi nous consacrons notre temps.

Quadrant 2

Et puis il y a le quadrant 2, le mal aimé, celui de ce qui est important mais pas urgent. C’est ici que se retrouvent la réflexion stratégique, et puis la planification. C’est ici aussi qu’est inclus le développement de vos compétences, et ces tâches dont on se dit qu’on s’en occupera quand on aura le temps. C’est aussi ici qu’on laisse de côté des éléments comme notre santé/nos activités sportives, des moments en famille, la lecture…

Alors si vous voulez disposer de plus de temps pour ce qui est important sans être urgent, dont la réflexion stratégique, la première étape est d’identifier ce que l’on pourrait appeler des voleurs de temps, et puis ces tâches pour lesquelles, même si vous avez envie ou besoin de vous assurer qu’elles soient réalisées de la bonne façon et au bon moment, n’ont pas nécessairement besoin de votre intervention directe. Bref, il faut aussi (re)découvrir les charmes et bienfaits de la délégation.

Créer de la valeur

Une fois que vous avez identifié ce qui est important, encore faut-il déterminer ce qui, selon Pareto, représentera le 20% de votre temps générant le 80% de la valeur de vos activités. Et pour vous assurer que vous puissiez vous consacrer pleinement à une chose à la fois, question d’être efficace, cela impliquera de réserver du temps dans votre agenda, à la fois du temps sans interruption et de brèves pauses (5 minutes chaque heure) pour vous permettre de passer à la prochaine heure dans les meilleures dispositions. Et puis, dans l’important, n’oubliez pas votre santé et ce qui fait votre bonheur…c’est difficile de travailler, et d’être efficace, lorsqu’on n’est pas en forme, que ce soit physiquement ou mentalement.

Voici quelques exemples d’activités à mettre à votre agenda pour penser à votre stratégie :

  • Participation à un colloque sur les dernières tendances dans votre secteur;

  • Rencontre mensuelle avec votre équipe pour faire l’analyse des risques et de leur impact sur vos activités;

  • Lunch and learn avec la relève pour discuter de la vision de votre entreprise à 5 ans;

  • Atelier visant à identifier votre culture et votre capacité à innover;

  • Journée de réflexion stratégique semestrielle;

  • Formation sur le développement de la pensée stratégique ou le Design Thinking;

  • Tête-à-tête hebdomadaire avec vous-même pour faire le point des activités prévues dans les deux prochaines semaines et évaluation de leur valeur ajoutée…

 

Alors bonne réorganisation de votre agenda et puis…bonne réflexion et planification!

Vous avez envie d’en savoir davantage sur la pensée stratégique et de développer vos compétences en la matière pour générer davantage de valeur? Voici un ouvrage qui pourrait vous intéresser Où est mon sentier battu? La pensée stratégique pour cheminer autrement vers une saine création de valeur.


Sources :

[1] Only three-fifths of managers’ time adds value to the organization | Get More Done

[2]  CEO Focus for 2023: What Should a CEO Focus on? (rhythmsystems.com)

[3] https://fr.wikipedia.org/wiki/Dwight_D._Eisenhower

[4] 7 https://fr.franklincovey.ca/the-7-habits/  

Bernadette Petitpas